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mercredi, 20 novembre 2019 14:50

Peur ou fécondité

Un Monsieur riche partit en voyage et donna des sous à ses serviteurs pour faire fructifier. Les uns les firent fructifier et l'autre l'enterra par peur de le perdre. Lc19, 11-28. Ce texte de Luc me renvoie à notre liberté intérieure. Est-ce que dans ma vie spirituelle j'agit par souci de fécondité ou par peur ou manque? Jésus nous dit en »Marc: le royaume de Dieu est en vous. Pierre nous révèle dans sa 2e lettre: "La puissance divine nous a fait don de tout ce qui est nécessaire à la vie." 2 P. 1, 3. La vie divine en nous contient tous les dons nécessaires à notre vie chrétienne. Notre façon de les utiliser et d'en vivre doit être animée par cette volonté de croissance. Faire croitre en nous ces dons au service du royaume de Dieu. Il nous est demandé de faire grandir la fécondité de notre être.

Nous sommes appelés à être positif. Trop souvent nous partons du négatif pour se convertir. Les gens de la parabole en Luc ont fai fructifier ce qu'il possédait et il s'est multiplier. L'un était négatif, il avait peur, et son don est resté sans progrès. C'est l'image de notre vie spirituelle. Nous avons l'impression souvent d'être bon chrétien si nous avons fait beaucoup de pratiques, de prières, de dévotions qui laissent trop souvent un vide parce que ce sont des choses extérieures à nous et qui ne font pas grandir. Ce n'est pas l'activisme qui compte mais la fécondité. Nous avons peut être oublié cette dimension essentielle dans notre vie d'Église. Nous mettons l'accent sur les activités extérieures, les pratiques de rituel, qui nous laissent insatisfaits, qui laissent un vide en dedans. 

On me disait quand j'ai étudié la liturgie que le rite d'ouverture de la messe était là pour nous placer en présence de celui qui nous avait convoquer à la célébration. Prendre conscience ensemble de la bonté et de l'accueil comme de la grandeur du Christ Jésus qui nous invite à ce rassemblement d'action de grâce. C'était un rite d'ouverture. Rapidement il est devenu "le rite pénitentiel". Nous sommes descendus vers nous au lieu de monter en action de grâce et prendre conscience de la divinité qui nous habite et qui nous rassemble en communauté.

Nous sommes davantage dans une vie de performance que de fécondité. Nous nous attachons au nombre de prières plutôt qu'a la richesse de la prière. Parfois je vais négliger des rencontres avec les gens pour satisfaire mes règlements de ferveur. Les chrétiens sont partis avec un vide spirituel, en recherche de valeurs et de sens à la vie et nous visons le retour à la pratique et non la fécondité de la vie chrétienne au quotidien. Nous sommes toujours dans cette vie de performance et non de fécondité. Derrière cela il y a un manque de liberté intérieure qui me fait obéir à des normes et des pratiques plutôt que de rendre ma vie spirituelle féconde selon l'Évangile. Nous avons davantage appris à obéir qu'à devenir fécond. Nous avons tout ce qu'il nous faut, nous dit Saint Pierre, il s'agit de bien l'utiliser. 

Une question majeure pour nous est de se libérer de ces structures intérieures héritées de notre histoire pour retrouver la liberté de l'Évangile. Apprendre à vivre, prier et célébrer non POUR mais PARCE QUE.  Je ne vais pas à la messe pour avoir des grâces ou pour prier pour mes parents défunts, comme on le fait beaucoup aujourd'hui. Je vais à la messe parce que je suis un être de communion, en communion avec mes soeurs et frères et avec mon Seigneur et j'ai le goût de célébrer cette réalité. Je prie parce que je suis un être spirituel et j'entre en relation avec ce divin qui est en moi. Dans la vie ordinaire, je ne vais pas visiter mon père pour avoir de l'argent ou pour autre chose, je le visite parce que je suis son fils et que je l'aime et qu'il m'aime. Cet amour m'habite et je le fais grandir. Il en est de même dans ma vie spirituelle.

Dans le contexte de société où nous vivons, où l'accent est mis sur la performance,  où chacun est jugé selon son rendement, ne serait-il pas intéressant ou urgent de développer cette dimension de fécondité dans nos vies? Ne serait-il pas intéressant de mettre moins l'accent sur le mea culpa que sur l'alléluia? Je me souviens quand j'étais jeune, le curé avait un appareil au confessionnal pour compter le nombre de confessions et le premier de l'an, il nous donnait les statistiques. Et si une année le nombre avait diminué, nous avions droit à une semonce. Le tournant missionnaire nous invite à cette démarche de libération des schémas qui emprisonnent notre liberté intérieure pour devenir fécond comme nous le dit le texte de la création: "Soyez féconds" de cette fécondité de l'esprit, du coeur, de l'intelligence pour remplir la terre d'amour et de tendresse.

Inspiré du Père Anselm Grün: Conquérir sa liberté intérieure.